lundi 21 avril 2014
Il n’y a pas d’alternatives !
SOURCE: http://www.legrandsoir.info/il-n-y-a-pas-d-alternatives.html
Il n’y a pas d’alternatives.
Les "experts", ceux qui savent et nous disent quoi penser, ou plutôt, qui nous disent de ne plus penser, ceux qui sont toujours invités partout, qui envahissent nos télés, radios, journaux, ceux qui sont neutres et indépendants mais sont toujours salariés des lobbies, ces personnages au dessus de tout soupçon, ces autorités en la matière, qu’ils portent une blouse blanche, un uniforme, une soutane ou un costume triste, nous répètent à longueur de journée que le libre échange est de loin la meilleure façon d’organiser la société humaine, et qu’il n’y a pas d’alternatives sérieuses au capitalisme, qui est aussi la seule garantie des valeurs démocratiques et le seul défenseur des libertés individuelles.
Le capitalisme aussi est vecteur de progrès scientifique, de créativité et de variété pour le plus grand bien de tous.
La libre concurrence, sans intervention aucune, est génératrice d’émulation, et les producteurs vont rivaliser d’ingéniosité pour proposer des produits toujours meilleurs, toujours plus innovants, toujours meilleur marché, et tout celà toujours au bénéfice des clients.
Mon aspirateur.
J’ai acheté mon aspirateur il y quelques mois, après le décès à l’âge d’un an et demi de son prédécesseur. Il y avait un faux contact, et il m’a été impossible d’ouvrir le machin en plastique fragile pour réparer.
Je suis donc allé dans un magasin qui proposait un choix assez large : il y avait une vingtaine de modèles au moins. Alors comment choisir ?
La taille ? La forme ? Ils étaient tous de la même taille, tous compactes et minuscules, comme si les acheteurs d’aspirateurs habitaient tous forcément un studio de 10m².
La couleur ? Ils étaient tous soit rouges, sois noirs (remarquez, c’est un progrès depuis Henri Ford : "le client pourra choisir la couleur de sa voiture, du moment que c’est noir").
Le prix ? Ah voilà, c’était ça la différence entre tous ces modèles : le prix.
Puisque j’avais payé mon précédent aspirateur 30 € et qu’il avait vécu si peu de temps, je me suis dit que cette fois, j’allais investir plus, dans une marque connue et réputée pour sa qualité et sa robustesse.
J’ai donc "choisi" un modèle minuscule, rouge, de marque, et je l’ai payé plus de 100 euros.
Vous savez tous comment un aspirateur de type "traineau" fonctionne : on le pose au sol, on le tient par la partie dure au bout du tuyau, et lorsqu’on veut se déplacer, on tire sur le tuyau et le corps suis, puisqu’il est monté sur roues. L’idée, c’est de ne pas porter tout l’aspirateur, mais juste le tuyaux.
Néanmoins, mon aspirateur-traineau n’avait pas l’air d’avoir été conçu autour de ce concept pourtant pratique :
D’abord, le système de fixation du tuyau au corps de l’appareil me parut très fragile. Celà ne tenait que par l’élasticité de deux fine languettes de plastique et semblait très instable. Mais bon, après tout, je fais confiance aux professionnels, surtout à ce prix. Eh bien après quelques jours d’utilisation, les languettes n’avaient plus assez d’élasticité et le tuyaux se séparait du corps quasiment à chaque fois que je tirais dessus.
Un autre problème est aussi immédiatement apparut : le corps de l’aspirateur était tellement compact, et les roues tellement mal placées, que l’appareil ne pouvait pas tourner : à chaque traction qui n’était pas dans l’axe, il se renversait.
M’est alors revenu en mémoire l’aspirateur que ma mère avait acheté lorsque j’étais petit enfant (j’ai 44 ans), et dont nous nous sommes servi jusqu’à ce que, jeune adulte, je quitte le domicile familial : c’était à l’époque, je crois, l’un des premiers modèles d’aspirateur-traineau. Qu’il était long, qu’il était lourd, et qu’est-ce qu’il fonctionnait bien ! On pouvait bien tirer dessus tant qu’on voulait, le tuyau ne s’est jamais détaché du corps ! Quand on voulait le faire tourner, il tournait ! Et sans se renverser ! Et celà pendant au moins 15 ans, peut-être même plus...
Mon tee-shirt vert.
Il y a une quinzaine d’années de celà, j’ai voulu acheter un tee-shirt vert. J’habitais à l’époque en plein centre de Paris, et il y avait autour de mois, sans exagérer, des centaines de boutiques vendant des habits.
Première boutique : que des tee-shirts bordeaux, gris ou beiges. Et chers !
Deuxième boutique : d’autres marques, mais les mêmes couleurs ! Et chers !
Troisième boutique : encore pareil ! Encore plus chers !
Etc, etc...
Alors bon, au bout d’un moment, j’ai demandé à une vendeuse : "Mais enfin, pourquoi est-ce que partout où je vais, il n’y a que des habits bordeaux, gris ou beiges ?
- Ben, c’est la mode...
- Bon d’accord, c’est la mode, mais pourquoi ne vendez-vous pas aussi quelques habits avec d’autres couleurs ?
- Ben, c’est pas la mode..."
Découragé, je m’apprêtais à rentrer chez moi, quand soudain, je vis sur le trottoir un présentoir avait des tee-shirts de toutes les couleurs ! il y en avait même un vert !
Ce n’était pas un magasin d’habillement, mais une de ces boutiques, vous savez, "tout à dix balles". J’ai en effet eu mon tee-shirt vert pour dix francs (pas euros, hein ? francs, ça fait 1,50 euro, pour les plus jeunes ou les amnésiques).
Et mon moulin à café.
En panne, faux contact lui aussi. Je l’aimais bien, alors je suis allé chez l’électricien du coin pour qu’il le répare. Il ne s’agissait après tout que de ressouder un fil.
Ca m’a coûté plus cher que si j’en avais racheté un neuf.
Je pourrais multiplier les exemples à l’infini, et vous aussi.
Synthétisons nos expériences
Voici donc comment fonctionne une société organisée autour du capitalisme :
Les moyens de production sont privés, possédés par un nombre toujours plus réduit de personnes toujours plus riches, puisque les plus gros mangent les plus petits jusqu’à ce qu’un monopole (ou une entente discrète entre les quelques survivants, ce qui revient au même) advienne.
L’intérêt du producteur est de donner à l’utilisateur le moins possible, et de lui prendre le plus possible. Et celà le plus souvent possible. Il faut donc lui vendre des produits à coûts de production toujours plus bas (mais le prix de vente ne descendra pas forcément, lui) et d’une qualité de plus en plus mauvaise.
L’intérêt de l’utilisateur, lui, est de donner au producteur le moins possible, le moins souvent possible, pour un produit de qualité toujours meilleure, puisque la technologie progresse. C’est donc l’intérêt exactement inverse.
Il y a multiplication des marques et modèles proposés, et pourtant, au final, l’utilisateur a de moins en moins de choix, parce que tous les modèles sont redondants.
Chaque marque possède son propre laboratoire d’études où les ingénieurs sont payés pour concevoir le produit le plus mauvais possible, au plus bas coût de production possible, en suivant les directives des gens du département marketing qui n’ont absolument aucunes connaissances techniques.
Dans ces laboratoires, il y a des types très diplomés et très talentueux, dont l’unique fonction est de programmer les produits à devenir défectueux juste après la fin de la garantie (1).
Les notions de préservation des ressources et de pollution n’entrent absolument pas en ligne de compte lors de l’élaboration du produit.
Les notions d’ergonomie, de confort d’utilisation et en général de satisfaction de l’utilisateur pendant l’utilisation (et non pas pendant l’achat) sont aussi écartées.
Il y a ensuite une armée de publicitaires chargés de faire croire aux utilisateurs que ce produit est le meilleur choix.
L’utilisateur, lorsqu’il achète ce produit, le paye beaucoup plus cher pour rembourser les coûts de la publicité et les salaires de tous ces commerciaux qui n’ont contribué en rien à la production. Il paye aussi le transport depuis la Chine alors que dans la zone industrielle voisine il y a une entreprise qui fabrique un produit équivalent qui sera vendu en Chine.
Enfin, et surtout, si l’utilisateur n’a pas assez d’argent pour acheter le produit, il va emprunter à une banque privée de l’argent qu’elle va créer à partir de rien, mais pour lequel elle demandera le payement d’intérêts substantiels. Mais comme tout l’argent est créé de cette façon, l’argent des intérêts n’existe pas. L’utilisateur n’en est pas conscient, mais il est dès lors bel et bien en concurrence avec tous les autres emprunteurs pour trouver l’argent des intérêts. Celà veut donc dire que structurellement, une partie des emprunteurs ne peut pas rembourser sa dette et se retrouvera tôt ou tard à la rue (2).
C’est super efficace !
Il n’y a pas mieux
Les experts nous le répètent assez : Il n’y a pas d’alternative.
Allez-y, essayez-donc de proposer mieux. Alors ? Ah on fait moins les malins...
Bon, je vais m’y coller, juste pour vous amuser, mais je vous préviens, hein, je ne suis pas un expert !
Alors... imaginons, pour rire, qu’un gouvernement décide de nationaliser la production de... tout. De fait, tout le monde devient fonctionnaire.
Ce gouvernement décide aussi de retrouver sa souveraineté non seulement politique, mais aussi monétaire en nationalisant sa banque... euh... nationale.
Ah vous vous marrez, hein ?, vous croyez vraiment que les banques dites nationales ne sont pas privées ? Que la Fed aux états-unis, est une agence fédérale (3)(4) ? Que la Banque de France (repose en paix) n’a jamais été administrée par les fameuses 200 familles (5) ? Etc, etc...
Bon, une vraie banque nationale, donc. Un service public.
Maintenant, le gouvernement évalue ce qu’il est nécessaire de produire pour répondre aux besoins de sa population, en la consultant en permanence dans un processus de démocratie participative continu, et en prenant cette fois en compte les notions de renouvellement des ressources et de protection de l’environnement.
Il encouragerait autant que possible la vente locale, les prix étant réglementés et harmonisés afin de couvrir les frais de production, d’investissements futurs et de gestion, sans aucune recherche de bénéfice, il n’y aurait donc d’intérêt pour personne à transporter inutilement les produits.
L’argent serait créé par l’état, sans intérêt (il faut vraiment être idiot pour se faire payer des intérêts à soi-même), serait versé à tous de façon équitable, qui le dépenseraient en achetant ce qu’ils ont produit, et l’argent retournerait ainsi à l’état, etc...
Il n’y aurait même pas besoin d’impôts, puisqu’il suffirait de calculer la part necéssaire au fonctionnement de l’état et de distribuer le reste.
Puisque la production d’aspirateurs (eh oui, autant reprendre le même exemple) est nationalisée, il n’y aurait donc plus besoin d’avoir une multitude de bureaux d’études et d’unités de production redondantes et concurrentes. Il n’y aurait aussi plus besoin de commerciaux, publicitaires, marketing, etc... puisque les produits ne seraient plus conçus dans l’optique d’entrer en concurrence les uns avec les autres afin de générer le plus de profit possible pour une poignée d’investisseurs, mais au contraire pour satisfaire les besoins des utilisateurs.
La somme de travail necéssaire pour produire ce dont nous avons globalement besoin diminuerait, et nous aurions tous plus de temps libre. Après tout, le progrès sert bien à rendre la vie de tous meilleure, non ?
De plus, l’utilisateur n’aurait plus à financer cette somme énorme de travail inutile non-productif. Les produits seraient non seulement de meilleurs qualité, mais aussi moins chers.
Les ingénieurs et techniciens chargés de concevoir les produits auraient pour unique objectif la qualité et la satisfaction des utilisateurs. Ils ne suivraient plus les directives de "marketteurs" coupés de la réalité, mais les recommandations et requêtes des utilisateurs eux-même, le processus de démocratie participative permanante incluant aussi maintenant la production des biens et des services.
C’est vrai, il y aurait moins de modèles différents que du temps du capitalisme, il n’y aurait aussi plus de marques, mais comme chaque modèle serait conçu pour répondre à un besoin concret, l’utilisateur aurait en fin de compte plus de choix (des aspirateurs avec des caractéristiques différentes pour des besoins différents, mais sans redondances inutiles). La production étant au service et à l’écoute de l’utilisation, les produits seraient tous amenés à s’améliorer continuellement et seraient sous le controle permanent de la population.
Enfin, le gouvernement aurait pour mission principale d’inciter, de par la qualité de l’éducation et de la culture, les générations futures à ne plus se comporter comme des consommateurs capricieux, puérils et superficiels, mais comme des citoyens conscients et responsables.
Conclusion
Bon, ce n’est évidemment qu’un brouillon maladroit, et je ne prétends pas que ce soit la seule solution, ni la meilleure, mais maintenant c’est à vous de répondre et de proposer vos alternatives à ce capitalisme pour lequel, si l’on écoute tous ces gens qui nous parlent dans la télé, il n’y a pas d’alternatives plus efficaces.
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